INTERVIEW BOOMERANG : VOYOU

Samedi 14 décembre à Paloma, SMAC de Nîmes Métropole. Dernier concert de l’année 2019. (sans compter celui de Vanessa Paradis qui devait être en novembre).

Le chanteur Thibaud Vanhooland aka Voyou et sa troupe nous livrent une pop tropicale, dansante malgré des histoires racontées dans les textes parfois lourdes et tragiques. Ils ont débarqué dans la salle club avec leur multitude d’instruments alors qu’ils ne sont que 4 sur scène. Une plume magnifique, des voix sublimes et des instru qui te font oublier le froid de l’hiver (même si ok, on est à Nîmes et qu’on n’a pas à se plaindre).

Après le concert, ils m’accueillent dans leur loge pour un échange riche, drôle et touchant.

Membres du groupe interviewés (soit toute la troupe) : Thibaud aka Voyou (chanteur, trompette et d’autres instruments) / Laura Etchegoyhen (chœur, saxo et bien d’autres) / Lætitia N’Diaye (chœur, synthé et autres aussi) / Diogo Strausz (guitare, congas et encore d’autres) / Michael Declerck (ingé son) / Marie Bancquart (régisseur) / Maureen Ramshaw-Lemaire (ingé lumière).

–> Pour suivre Voyou : Facebook / YouTube

–> Album : Les Bruits de la Ville (sorti le 15 février 2019)

Voici leurs réponses :

(au cas où, NDLR = Note de la rédaction)

Une actualité heureuse pour vous ?

Thibaud: Je vais enfin me débarrasser de mon p***** de polype (NDLR : il se situe sur les cordes vocales, pas facile pour un chanteur :/). C’est vraie bonne nouvelle, je le traîne depuis plus d’un an. Et les 30 ans de Diogo ce soir, c’était les 30 ans de notre régisseuse Marie hier. Donc pleins d’anniversaires. C’est aussi notre dernier concert avant un moment.

Laura : C’est notre dernier concert avant avril.

 

Quelle est votre blague préférée ?

(rires généralisés à cette question, je pense qu’il n’en ont pas qu’une)

Lætitia : T’as une heure devant toi ?

Thibaud : Moi ça serait  “c’est un manège qui euh…”

Laura : Non non je ne pense pas. Celle-là ne marche vraiment pas avec tout le monde

Thibaud : Ah bon ? Ok alors “Ça commence”

Lætitia : La blague “Ça commence” !

Laura : Ok c’est moi qui la raconte ?

Unanime : Bien sûr !

Laura : C’est un gars il rentre dans un bar et il dit au serveur “Excusez-moi je vais prendre un whisky svp avant que ça commence”. Le serveur lui donne son whisky. “Je vais prendre un deuxième whisky svp avant que ça commence”. Il boit le deuxième whisky. “Excusez-moi, garçon, svp je vais prendre un autre whisky avant que ça commence”. Troisième whisky. (voix qui commence à être alcoolisée) “Scusez moi, j’vais prendre un autre whisky svp avant qu’ça commence”. Le serveur se dit mais qu’est-ce qui va commencer ?  Y’a pas de concert à Montmartre ce soir. Quatrième whisky, cinquième whisky, sixième whisky, septième whisky, huitième, neuvième. Dixième whisky. “Garchon, che v pend un aut visky avan qu’cha commenss”. Le serveur lui dit “Écoutez Monsieur, va peut-être falloir commencer à penser à payer là !” “Alllllezz ça commenceeee !”

On l’aime beaucoup celle-là !

Thibaud : En fait on a vraiment un catalogue de blagues gigantesque sur cette tournée !

Marie : C’est vrai que c’est épatant.

Laura : Y’a aussi toutes les blagues de Manex (NDLR : c’est un personnage du Pays-Basque natal de Laura, qui se prononce Manech)

Thibaud et Lætitia : Vas-y fais en une Laura !

Marie : Ouai mais faut garder la surprise, c’est un truc qui va sortir. Il y a un projet de BD !

Thibaud : J’en ai une c’est celle des trois vœux, mais elle est visuelle. Elle ne peut pas marcher.

Concertation générale sur quelle blague faire. C’est un véritable sujet d’équipe l’humour ! 

Thibaud : Il y a la blague des régisseurs, du sondier des lighteux, mais c’est plus une blague pour les musiciens ça. Sinon il y a celle des escargots. Elle est vraiment très drôle celle-là ! La blague de Manex qui va rendre visite à son cousin à Paris. “Je le connais ce type”.

Unanime : A ouai celle-là elle est bien !

Laura : C’est celle de ma mère

Thibaud : Putain elle est trop bien mais moi je suis pas basque, vaut mieux que tu la racontes toi (Laura). C’est toujours un plaisir de l’entendre !!

No Spoil ! Affaire à suivre dans la future BD ! (sauf si vous la réclamez en commentaire )

 

Votre dernier fou rire ?

Lætitia : C’est Kyriad !

Rires généralisés, mais celle-ci restera entre la troupe et moi. Il y en a un (pleins) d’autre(s) ne vous en faites pas !

Marie : Sinon après un autre dernier fou rire c’était dans le van, et on revenait d’une salle à l’hôtel. On avait juste 10 minutes de trajet, on s’ambiancait comme d’hab sur “Boris – Soirée Disco” et “Miss Camping” et là il y a eu un espèce de tour de danse derrière moi pendant que je conduisais et puis c’était parti quoi !

Je vous laisse imaginer ce qu’ils ont bien pu faire !

Laura et Thibaud : Il y en a eu vraiment beaucoup, on ne peut pas tout raconter. Ça salirait notre honneur !

 

Une phrase qui guide votre vie, un dicton ?

Thibaud : Y’en a pleins ! “Avoir la vie de carriole”

Laura et Marie : “On n’a pas des métiers faciles !” / “Ça fait des bonnes (longues) journées !”

Thibaud : La vie de carriole et sinon on fait beaucoup les forains dans le camion, genre les mecs qui tiennent les manèges !

Laura nous fait une démo avec sa meilleure voix toute droit sortie d’un Luna Park “Est-ce que vous en voulez encore !!! Allez les filles on fait chauffer les moteurs ! C’est le seul van qui rend les filles amoureuses ! On lève les bras dans les virages”

Thibaud : Et on le fait en vrai dans le camion quand il y a un virage comme si on était dans un manège. Donc beaucoup de phrases de forains comme ça.

Marie qui souligne la difficulté de le retranscrire par écrit. Vous me direz ce que vous en pensez 

 

Votre rituel bien-être ?

Laura : Avant concert on prend des bains, c’est super pas écolo mais…

Thibaud : Ah non pas moi, j’ai jamais pris de bain sur la tournée.

Unanime : On fait un gros câlin avant les concerts et on se dit pleins de petites phrases positives.

Thibaud : On se motive les uns les autres, on fait des petits mouvements de pieds en rond tous ensemble, parfois on se masse un peu. Puis un vrai rituel bien-être c’est de se raconter des blagues, surtout avec Manex  qui est notre personnage principal d’histoires drôles, un paysan basque de chez Laura.

 

La dernière cause que vous avez supporté ? (et il y en a beaucoup, je préviens )

Thibaud : Y’en a beaucoup (NDLR : je vous avais prévenus ^^), déjà le fait que les gens se rassemblent beaucoup dans la rue pour la cause des femmes, ça c’était quand même assez impressionnant et très important. C’était le dernier truc vraiment important, c’est qu’il y ait des gens dans la rue qui se soulèvent contre ça, contre le patriarcat. Et contre les violences faites aux femmes. En général contre une société très patriarcale.

Marie : La convergence des luttes globalement aussi.

Thibaud : Et il n’y a pas qu’en France, un peu partout on commence à sentir qu’il y a vraiment l’élite qui domine toutes les sociétés. Un peu partout c’est vraiment devenu mondial. Et il y a des luttes qui se créent dans pleins de pays différents, même dans des pays qui sortent de guerre. En Irak il y a des mouvements de jeunes qui se soulèvent de ouf en ce moment.

Marie : Partout en vrai, en Algérie…

Thibaud : En Amérique du Sud aussi beaucoup. Aussi on en parle pas du tout dans les médias mais ce qu’il se passe en Chine, à Honk Hong.

Laura : On en parle pas à la hauteur de ce qu’il se passe. Là tu vois ce qu’il se passe par exemple par rapport aux grèves qu’il y a vis-à-vis de la réforme des retraites, les médias sont en train de parler de “est-ce qu’on ferait pas des compartiments réservés aux femmes ?” mais en fait on ne parle pas de ce qu’il se passe politiquement. Mais c’est ce qui nous intéresse et ils sont en train de dévier le propos sur les compartiments réservés aux femmes. Mais c’est pas de ça qu’on parle, c’est la honte de ce qu’il se passe au niveau gouvernemental par rapport à la réforme des retraites.

Thibaud : Puis aussi tout le soulèvement par rapport au climat ! Qui est hyper important, qui est encore très balbutiant (NDLR : débutant, hésitant, commençant) et qui peut être contradictoire sur les manières de faire, on sent qu’en même que les gens ont envie. C’est pas encore ça dans l’application, notamment personnelle, mais par contre on sent qu’il y a une vraie conscience collective qui se passe.

Ombline : une autre question qui me vient, comment vous le vivez en temps qu’artistes en tournée ?

Thibaud : On en parlait tout à l’heure à table, il n’y a que Maureen qui est végétarienne, même si on fait très attention à notre consommation de viande, on ne dit pas sur notre rider qu’on est végétariens. Ce qui fait qu’à toutes les dates on mange de la viande. On mange de la viande deux fois par jour sur toutes les dates de concert et ça c’est un vrai problème. Moi dans ma vie de tous les jours je ne bouffe jamais de viande. Et en concert tout le temps. Il y a un truc très paradoxale car un truc qu’on applique dans notre vie privée, on n’est pas encore capables de l’appliquer dans notre vie professionnelle. On est aussi en camion…

En résumé après, on a parlait des riders, qu’il était compliqué d’anticiper à l’avance les demandes des artistes mais qu’un effort peut être fait si tout le secteur change.

Lætitia : Le concept même de partir en tournée n’est pas écolo en fait ! C’est un enfer d’être en tournée quand tu as une conscience écologique. C’est hyper difficile d’allier les deux. On essaie de faire des petits gestes.

Thibaud : Oui par exemple les gourdes en tournée. Mais ce n’est rien à côté de ce qu’on se disait à table concernant la viande.

Mich : Puis on va dans des hôtel tous les jours où les couettes, les serviettes sont lavées tous les jours. En vrai si on était vraiment responsables on se baladerait avec nos draps et nos serviettes et on les mettrait tous les jours. Mais ça c’est possible que si tu as une organisation de la société qui fait que c’est comme ça. Individuellement on ne peut pas arriver avec nos draps dans les hôtels.

Thibaud : Tu ne peux pas reprocher aux consommateurs par exemple de consommer beaucoup de plastique là où en fait il n’y a jamais personne qui interdira l’utilisation du plastique, du sur-emballage et des trucs comme ça.

Marie : C’est difficile d’acheter sans plastique, il n’y a pas assez d’alternatives !

Thibaud : C’est ultra compliqué.

Marie : En tournée on demande aucune vaisselle en plastique, que de la vaisselle qui est réutilisable, c’est spécifié dans le rider. D’abord parce que c’est important puis c’est plus agréable et qu’on se dit pourquoi nous en loge on aurait des gobelets en plastique quand dans la salle il y a des gobelets réutilisables ! (verre ou éco-cup).

Thibaud : Il y a quelques salles qui ont des bouteilles en verre avec de l’eau pour tout le monde. Même si tu dois t’auto-responsabiliser sur beaucoup de choses, s’il n’y a pas des gens au-dessus qui te facilitent la tâche, ça devient une sorte de petit calvaire de réussir à faire en sorte d’utiliser aucun plastique.

Marie : Si je peux me permettre il y a un point de convergence entre tout ce dont on vient de parler, que ce soit le patriarcat, les luttes sociales etc c’est le capitalisme.

Thibaud : Je suis hyper d’accord, il y a un vrai problème.

Marie : C’est le point qui converge toute la m****, il vient de ce modèle de société qui fait que le plastique c’est plus rentable, le patriarcat ça arrange bien le capitalisme, tout ce qui est fait pour écraser des minorités etc parce que c’est comme ça qu’ils font des profits.

Thibaud : Le problème c’est que les gens qui tiennent les rennes de nos sociétés, ils préfèrent mourir sous le capitalisme et faire sauter la planète plutôt que renoncer à un peu de confort et de richesses.

Marie : Parce qu’ils savent que eux ne crèveront pas.

Thibaud : On parle de gens qui ont assez d’argent pour faire vivre 65 générations.

Marie : Les riches n’ont jamais été aussi riches. On est gouvernés par des gens psychopathes, névrosés, car le pouvoir rend fou.

Thibaud : Toutes les fins de civilisations ont été dues à ça. L’Empire Romain ça a été exactement la même chose. Les riches deviennent tellement riches qu’ils deviennent les seuls à pouvoir acheter des choses, toutes les personnes qui travaillent pour eux se mettent à ne plus pouvoir vivre, du coup ils crèvent et eux se retrouvent tout seul à ne plus savoir quoi faire dans leur société qui est détruite.

Marie : Une autre cause à laquelle on est sensibles et qu’on essaie de s’imposer, qui n’est pas du tout un calvaire, c’est que sur cette tournée on est 4 filles sur la tournée et 3 mecs. On fait vraiment une équipe paritaire. Thibaud est vraiment très sensible à ça, il voulait une équipe paritaire parce que dans le monde de la musique ce n’est pas encore assez courant. On est deux filles et un mec à la technique, ils sont deux filles et deux mecs sur scène et ça c’est très important pour nous.On sent que dans l’équilibre du groupe c’est important, dans la diversité musicale.

Thibaud : C’est pas le fait de se dire qu’il faut des équipes entièrement féminines mais au moins paritaires ! Sinon après tu rentres dans une espèce de lutte bizarre.

Unanime : On a énormément de causes en fait ! L’écologie, les animaux…

Thibaud : On aime beaucoup les chiens, on trouve ça très mignon

Lætitia : On aimerait en adopter un quand les hôtels les accepteront, on lance un appel !

Thibaud : Et les campings parce qu’on aime bien le camping !

Laura : Et les forains ! Et on veut un chien écolo.

Mitch : Moi je lui fais manger du végétal à mon chien. Merde j’ai cassé un truc là ^^

 

Votre musique en une phrase ?

Mitch : Pour moi Voyou c’est un karaoké de Daniel Balavoine. Voilà, aller, bonne soirée j’me casse.

Marie : Une famille !

Diogo : Pour moi c’est de la poésie que je ne comprend rien (NDLR : il est brésilien)

Maureen : C’est l’essence de la pop, dire de jolies choses sans prétention. Simple mais efficace.

Laura : C’est de la pop qui fait une déclaration d’amour à la vie et aux gens.

Thibaud : C’est un partage, d’abord avec les gens qui sont sur scène et sur la route avec moi, et un partage avec les gens qui viennent nous voir en concert.

Lætitia : Ce que je constate, je l’ai vécu avant, je l’ai vu en concert avant de jouer avec lui, c’est que c’est le genre de concert qui permet de s’évader vraiment, d’oublier tout le reste et de sortir avec le sourire et moins de soucis en tête quelques temps. Au moins le temps d’une soirée.

Thibaud : Merci les copains !

Un mot pour votre public nîmois :

Thibaud : Moi j’ai envie de dire au public nîmois, un nîmois vaut 113 personnes.

Rires généralisés

Merci aux artistes de m’avoir accueilli après leur concert, leur dernier concert avant leur retour sur scène en avril. C’était génial.

 

Interview et retranscription par Ombline de Viens On Fait Rien.

Photo : Événement Facebook de Paloma